Dans cette interview, Galilé Bernard, le jeune créateur du concept G.DU.BOIS, nous parle de son histoire personnelle, comment il a eu une idée de créer cette SCIC et comment il espère la faire évoluer.

Galilé, pourras-tu nous parler de toi et de ton parcours ?
Je suis né à Paris au tout début de ce millénaire, mais j’ai passé mon enfance sur l’île de la Réunion. Ma mère était psychologue à St Denis et mon père artisan Tailleur de pierre, il restaurait les monuments historiques sur l’île et dans les pays limitrophes de l’Océan Indien. Jusqu’à mes douze ans j’ai beaucoup voyagé avec mes parents et mon frère.
Mon bilan carbone a été catastrophique, (l’Ile Maurice, Rodrigues, Mayotte, Madagascar, l’Afrique du Sud, l’Australie) mais surtout deux pays mon marqués, la Nouvelles Zélande et la Namibie par leurs géographies, climat, paysages et surtout population. A la Réunion comme dans ces multiples pays c’est la créolité de ces lieux qui ont façonnés ma personnalité.
A mes douze ans mes parents se sont installés dans le centre de Paris. J’ai vécu ce choc comme une nouvelle aventure, les « Eclaireurs et Eclaireuses Unioniste dans la patrouille de l’Oratoire», mais aussi les différentes manifestations, les squats, « Notre Dame des Landes », « La Dune en Vendée » m’ont permis là encore de rencontrer beaucoup de gens différents .
Après ma scolarité dans le collège J.B Poquelin j’ai eu la chance de réaliser la même formation que mon frère aîné au lycée Auguste Renoir dans le 18 AR de Paris en classe STD2A.
Quel est ton parcours scolaire ?
Au lycée j’ai suivi la voie de mon frère aîné, (qui est décorateur-tapissier actuellement) avec une formation au lycée Auguste Renoir (Paris 18°Ar.) et un bac STD2A en 2019.
Quel était le contexte de cette formation ?
Dès le début de la seconde mes professeurs ont su préserver notre libre arbitre autour d’un cadre pédagogique, j’ai été très à mon avantage, nous avons pu tous développer un thème qui nous était proche.
Quel était ton thème de recherche sur ces trois ans en dehors des cours imposés ?
Grâce aux contacts de mon père avec l’ONF, les agents de cet organisme nous ont mis en relation avec la scierie Bigeon qui produit des manches d’outil en Hêtre et en Frêne. Très vite nous avons pris l’habitude de passer une partie de mes vacances scolaires dans la scierie afin de mettre à l’épreuve mes idées et de produire mes prototypes.
Que fais-tu quand tu ne travailles pas ?
La nature et les rencontres sont mes deux grandes occupations.
Si je ne travaille pas je pars en balade sur les sentiers à la découverte (j’ai parcouru ainsi 1500 kilomètres l’année dernière, après le premier confinement)
La rencontre est un besoin vital pour moi, si je suis à Paris je vais forger avec des copains, tous pris dans une histoire personnelle intéressante et résistante.
A mon arrivé à Paris j’ai participé avec ma famille à une redistribution alimentaire que nous avions créée, cela a renforcé mon besoin de partage avec l’autre comme étant l’un des piliers de ma vie.
Nous faisions le tour des boulangeries de mon quartier et récupérions les invendus aux parisiens sans logements mais également à des personnes aux faibles revenus, cela leur permettait de manger et à moi d’apprendre ce qu’est la dignité humaine, cela a duré 4 ans trois soirs par semaine.
Ce fut une grande leçon d’humilité tout comme le fut mon engagement auprès des gilets jaunes ou pour la libération de Julian Assange.
Parle nous de ton expérience dans la scierie Bigeon depuis combien de temps y es-tu impliqué ?
J’ai commencé dès mon année de seconde à tenter de formaliser mon projet autour du design et de la création de meubles.
En cela j’ai été énormément soutenu, lorsque j’ai commencé à réaliser mes prototypes, par l’équipe enseignante du lycée Auguste Renoir mais aussi par de nombreux adultes, je n’avais que 16 ans, m’ont soutenu, encouragé et donné les bons conseils aux bons moments.
J’ai commencé à dessiner et à réaliser des prototypes que j’ai pu exposer et travailler non seulement mes capacités en design mais également passer à la réalisation, ce qui est bien sûr le rêve.
Et alors ?
Nous avons créés la SCIC G.DU.BOIS en mars 2020, après mon bac, au mois de juin car je devais avoir 18 ans pour signer. Avec le groupe de la SCIC nous avons déposé un dossier de financement pour passer à la phase de production. L’optimisation de la production des meubles était indispensable, fin novembre la BRED nous a accordé un prêt de 170 000 € sur 5 ans, nous avons porté la capitalisation de la SCIC à 96 500 € fin 2020. En mars 2021 nous avons réceptionné le ROBOT de la COMEC (société concepteur et producteur Italien).
Avec l’aide la société MPI de Tours qui est en charge du suivi technique et après une formation de 10 demi-journées en visio-conférence avec un ingénieur de la COMEC j’ai pu acquérir les bases du paramétrage et de l’usage des outils.
Cela te semblait-il une lourde responsabilité ?
J’ai 20 ans et je suis totalement inconscient.
Depuis ces débuts quels sont les résultats ?
Nous avons une date butoir qui est l’ouverture du salon du MIF en novembre. Nous avons profité de cette période, soit six mois, pour tester nos possibilités. Ayant déjà mis au point plus de 40 modèles, j’ai eu le choix de prendre 10 modèles et de me mesurer à une production pré industrielle.
L’ONF nous a mis à disposition 200 M3 de grumes de Mélèze et de Douglas et 20 M3 de chêne. La scierie Bigeon a géré le débit et le séchage, nous avions tout sur place, depuis la fin 2020 je vis dans un mobil-home que nous avons installé à la scierie, moi-même je suis sur place en permanence.
Parle-nous de cette évolution ?
Après cette première mise au point sur du mobilier en accord avec notre principe de rendre possible tout le montage par le client. Nous avons voulu nous mesurer à une charpente de type PH. Delormes pour construire le futur stand. C’est à ce moment que j’ai compris que nous pouvions aller plus loin, voire beaucoup plus loin.
Parle-nous de cette maison en kit en court de validation avec un bureau d’étude
En mai nous avons conçus une maison en kit avec mon père (qui a pensé à cela au vue des possibilités du robot) de 90 m2 avec des éléments inférieur à 35 KG. Cela a donné le paramétrage de 28 modules et de 380 éléments pour construire la structure. Gilbert et Martin nous ont beaucoup aidé
Le robot était-il prévu pour cela ?
Non mais nous avons su transformer les contraintes en solution autour de l’auto –construction même d’une production telles qu’une maison. Les contraintes sont parfois source de création et nous avons su travailler en totale collaboration à tous les niveaux de ce nous voulons concevoir et produire en autonomie autour d’un lieu et de sa ressource uniquement.
Comment as-tu, à ton âge trouvé ta place dans ce processus de collaboration
Cela a été très rapide je pense qu’il y a depuis le début une parfaite confiance entre nous et une réelle collaboration, cela fait, doit faire, je pense de belles réalisations.
Comment vois-tu la suite si cela fonctionne après le salon du MIF ?
Je ne sais pas je compte sur mon entourage afin de maitriser ces nouveaux paramètres, car pour moi c’est totalement l’inconnu. En un an beaucoup de choses intenses me sont arrivées, après l’école cela a été très brutal mais passionnant.
Voici une de mes sources d’inspiration :
ARGUMENTAIRE G.DU.BOIS
« Aux géométries utiles et aux articulations franches et solides» Pierre Chapo.
« C’est du bois, c’est la joie et ça marche » Pierre Chapo.
« Tout ce que j’ai fait a toujours découlé d’une pensée qui était instantanément constructive. Je n’ai jamais eu une vision ou une forme à l’esprit, je n’ai pas de style . Je n’ai jamais dessiné de formes. J’ai fait des constructions qui avaient une forme » Jean Prouvé.
« C’est l’utile qui construit le style ! ».